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从水之道而不为私焉
23 septembre 2012

Ecrire le chinois

POUR BIEN ECRIRE UN CARACTERE

 

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Ecrire un sinogramme, c'est s'intégrer dans un monde fantastique, un monde autre, avec une formidable tradition et une histoire millénaire. C'est devenir autre, c'est dire : "Je peux devenir comme toi !"
Savoir écrire un caractère chinois c'est connaître par coeur la séquence de traits qui le composent, dans le bon ordre et dans le bon sens.

La langue chinoise, qui ménage tant d'intervalles de silence, de mystère et de rêverie entre ses caractères ou ses mots, qui laisse une place immense à l'intuition, voire à la divagation (taoïste...), impose par contre une extrème rigueur dans la composition des ses caractères.

Les calligraphes chinois commencent toujours par copier, copier, copier les maîtres. Il existe des livres d'estampages de calligraphies célèbres, en vente dans les librairies et qui proposent les fameux modèles. C'est la situation de la graine en hiver : le yang créatif est sous la terre (yin) et ne se manifeste pas. Ainsi, on copie des sinogrammes, soumis par cette rigeur du modèle. Après des heures, des mois de pratique, sa propre personne finit par éclore et sa propre écriture apparait : c'est le printemps, le yang se manifeste au regard des autres et on est parvenu à infléchir le modèle pour en faire son écriture personnelle.

Ce travail de répétition doit aboutir assez vite à acquérir une "mémoire motrice", c'est à dire que bientôt, la main coulera seule sur la feuille de papier, sans réfléchir. La mémoire motrice c'est ce qui nous fait... danser ! La maîtrise des pas du rock ou du tango, que l'on a d'abord répété péniblement, est venue par la pratique, on danse et se laisse aller à ce frisson. Ecrire le chinois, c'est pareil, c'est une danse de la main.

Deux traits fondamentaux : "heng", le trait horizontal et "shu", le trait vertical. Vous voyez, même les traits ont des noms !

Heng, trait horizontal : c'est la marque de l'infini, l'horizon, ce qui unit le ciel et la terre. Il passe comme le train de l'avenir : de gauche à droite. Si vous êtes gaucher, le trait part de la main qui agit vers celle qui rêve, au repos. Si vous êtes droitier, le trait passe de la main qui imagine, silencieuse, vers celle qui agit.

Shu, le trait vertical : c'est le trait de l'encre qui coule, à l'image de la pluie : du haut vers le bas. Le pinceau, -imaginez que vous tenez un pinceau à la place du stylo-, c'est le lien entre le ciel et la terre. Le ciel est shang4 , au-dessus, mais shang4 désigne aussi en chinois ce qui est avant, antérieur. Le ciel est bien prééxistant à la terre (L'univers a 15 milliards d'années d'âge, la terre 4,6 seulement) La terre est en-dessous, xia4 , et ce caractère signifie également après, postérieur, comme l'est la terre par rapport au ciel. Le trait vertical vient donc du ciel pour descendre vers la terre.

shi2, le caractère 10 (dix) , soit l'intersection entre deux traits perpendiculaires / C'est le trait horizontal d'abord, le vertical ensuite. Horizontal, c'est la position couchée, le trait vertical est un mouvement. Dans la vie, on commence par être couché pendant de longs mois avant de se mettre en mouvement, debout.

Ci-dessous, calligraphies de WANG Xizhi (3° siècle), reproduites par estampages dans un de ces livres dont il est question plus haut. Vous y reconnaissez certains caractères !

 

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从水之道而不为私焉
  • Un blog de Frédéric Pauchot alias Bao Shoufei (bsf), prof de chinois. la Chine, comme toujours, le monde, vu d'un papillon, le papillon de Zhuangzi... Toutes les photos et textes sont de l'auteur, sauf mention contraire.
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